samedi 31 mai 2014

La rocaille de Georges


Le jardin de Georges photo au delà du cliché

Surprise
Je méditais; soudain le jardin se révèle
Et frappe d'un seul jet mon ardente prunelle.
Je le regarde avec un plaisir éclaté;
Rire, fraîcheur, candeur, idylle de l'été !
Tout m'émeut, tout me plaît, une extase me noie,
J'avance et je m'arrête; il semble que la joie
Etait sur cet arbuste et saute dans mon coeur !
Je suis pleine d'élan, d'amour, de bonne odeur,
Et l'azur à mon corps mêle si bien sa trame
Qu'il semble brusquement, à mon regard surpris,
Que ce n'est pas ce pré, mais mon oeil qui fleurit
Et que, si je voulais, sous ma paupière close
Je pourrais voir encor le soleil et la rose.
Anna de Noailles

La rocaille de Georges photo au delà du cliche pascal blachier

Attention-chef d'oeuvre ! Parfois l'art s'offre à nous dans toute sa splendeur, une sculpture, un tableau, une oeuvre littéraire, autant de choses maitrisables lorsque l'on possède le talent, mais la maitrise de la nature, ou plutôt son orientation en collaboration, c'est autre chose. La maitrise n'est plus totale, les éléments extérieurs sont prégnants et parfois délétères il faut être attentif, être à l'écoute, s'adapter, réorienter ses désirs, ses rêves. Il faut être un maitre dans cet art à part entière, un passionné en botanique, un amoureux courageux et patient. Le labeur est quotidien et si les plantes parfois doivent pour s'adapter souffrir un peu, le jardinier lui, brise son corps pour enfin pouvoir, le jour venu, apaisé, jouir de son travail.



Voici une petite merveille, parti de rien, juste une pente herbeuse orientée au soleil levant, Georges, passionné talentueux a réalisé au fil des ans, l'une des plus belles rocailles de la région. Ne comptant pas son temps et son énergie, il a déplacé des tonnes de pierres à la seule force de ses bras et de ses jambes pour mettre en place ce décor magnifique.





Aujourd'hui, la rocaille arrive à maturité, le visiteur ne peut, qu'envieux,  désirer un tel chef d'oeuvre chez lui. Nulle part, trace du travail de titan réalisé, il faut connaitre cette terre, la nature de ce sol calcaire ingrat pour apprécier les difficultés affrontées.



La rocaille est comme une scène de théâtre, comme un tableau immense et précis, et c'est une aventure de s'y plonger, les perspectives sont réfléchies, étudiées, il faut prendre le temps de perdre son regard dans ce monde végétal fabuleux.



Pour l'appréhender pleinement il faut tourner autour, s'accroupir, prendre son temps, se laisser remplir, s'imprégner de cette nature et du regard du jardinier qui reste là, invisible, mais bien présent, comme une trame nécessaire.





Les détails, les couleurs, les odeurs, le cheminement du soleil, les nuances dorées de la lumière donnent à chaque instant un visage différent à la rocaille. C'est un univers entier qui a été créé, un lieu unique où l'esprit s'apaise, où le cerveau lâche prise, laissant enfin les clameurs du quotidien se calmer.



Ce magnifique jardin est privé, un lieu hors du temps à l'accès confidentiel et préservé, le respect qui semble inné pour ce genre d'endroit ne va malheureusement pas de soi. Ainsi, Georges et Anne Claire sa compagne ont eu la pénible surprise de trouver un jour une promeneuse nonchalamment assise au beau milieu des plantes, en écrasant certaines. Elle avait trouvé le lieu idéal pour téléphoner, inconsciente du travail accompli,  de la préciosité du lieu et de la fragilité de la végétation qui l'entourait. Triste représentante d'une trop grande partie de nos contemporains perdue dans un univers mercantile, négligeant la simplicité et l'authenticité de la nature qui nous entoure.




Si Georges a su avec talent rendre hommage à la nature, cet article est pour moi, le modeste moyen de rendre hommage à son travail, à sa persévérance, à son courage et plus simplement à sa personnalité remarquable et unique. 










"Tous les événements sont enchaînés dans le meilleur des mondes possibles ; car enfin, si vous n'aviez pas été chassé d'un beau château à grands coups de pied dans le derrière pour l'amour de Mlle Cunégonde, si vous n'aviez pas été mis à l'Inquisition, si vous n'aviez pas couru l'Amérique à pied, si vous n'aviez pas donné un bon coup d'épée au baron, si vous n'aviez pas perdu tous vos moutons du bon pays d'Eldorado, vous ne mangeriez pas ici des cédrats confits et des pistaches. -- Cela est bien dit, répondit Candide, mais il faut cultiver notre jardin."



Merci Georges, pour ce lieu extraordinaire, magnifique et apaisant, merci de nous accorder le privilège de pouvoir le visiter, et bravo, tu mérites toute notre admiration.















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